Il emmenait ses élèves à la boxe et chez les prostituées. Elle portait des jeans et on lui crachait dessus dans la rue. Le couple mythique dansait au Café de Flore à Paris et s’aimait de façon contingente. Un amour complexe. Sans attache. Non nécessaire. Car l’Amour, selon Sartre, c’est la possession d’autrui. Le pape de l’existentialisme voulait se sentir libre. Libre de refuser le Nobel de littérature, libre de se sentir libre sous l’Occupation, libre d’aimer son « Beaver » – son castor –, comme il appelait une Simone de Beauvoir qui a dû composer avec ses études, faire figure de proue du féminisme en France et assumer des « amours contingentes », quitte à en perdre la tête.

Aujourd’hui, on dirait de Sartre qu’il était polyamoureux. Aimer plusieurs personnes en même temps. Pourquoi pas. Tout le problème vient du consentement d’autrui. Est-on prêt à renoncer à notre conception conservatrice de la fidélité pour assumer nos envies, nous sentir libres, être des existentialistes du XXIe siècle ? L’amour et la liberté, couple difficilement conciliable. D’ailleurs, un mariage sur deux finit en divorce. Fidélité, liberté et amour. Difficile de ne pas céder à nos tentations. Sartre était-il responsable de ses actions et assumait-il le mal qu’il faisait à sa compagne qui l’aimait éperdument ? 

Si la citation de Beaver « un homme sur deux est une femme » nous renseigne sur le XXe siècle, on peut se demander si l’inverse n’est pas aussi vrai aujourd’hui.

Pour aller plus loin:

Pierre de Bonneville, Sartre et les Amours Contingentes : Essai, L’éditeur, 2018.

France culture

Article de L’Express

Ilan Duran Cohen, Les Amants du Flore, 2006